Impossible, hier soir, de mettre en ligne mes impressions, à chaud, de l'investiture d'Obama: la borne internet de l'aéroport à préféré, à trois reprises, effacer ma note plutôt que de la publier...! Qualité insuffisante du texte ? Censure américaine ? Maladresses techniques de l'auteur ? "God knows", diraient les américains. Je re-tente ma chance, depuis Marmande.
La journée d'hier fut historique, c'est évident. Il fallait voir la foule, immense, joyeuse, multiple, qui se pressait dans Washington. Pour les heureux élus qui, bravant le froid, parvinrent à franchir les barrages de sécurité (et les contrôles des forces de l'ordre, totalement dépassés par l'ampleur de la mobilisation), l'événement restera gravé dans les mémoires. J'ai été frappé, surtout, par l'émotion des "black americans": les plus anciens ont encore connu, vécu, subi dans leur chair les humiliations innombrables liées à la ségrégation raciale. Aujourd'hui, leur pays lave l'affront, en investissant un président jeune, au parcours atypique, au destin en marche. Et quel bonheur, aussi, de voir le visage d'une autre Amérique réapparaître enfin: celui d'une Amérique ouverte, cosmopolite, tolérante, riche de sa diversité, pleine d'espoir malgré la crise qui mine la confiance.
Le discours d'investiture d'Obama fixe le cap pour les années à venir. Le discours fut, bien sûr, historique en raison de l'orateur qui l'a prononcé. Sur le fond, je ne suis pas certain, cependant, qu'il entre dans l'Histoire comme un discours fondateur. Il contient des messages importants: message d'espoir et d'incitation à l'effort, pour surmonter la crise. Message de fermeté, pour que les terroristes ne croient pas venu le temps du laisser-faire. Message d'ouverture au monde, avec une main tendue à tous ceux qui recherchent sincèrement la paix, le développement et la solidarité internationales. Et message démocratique, en rupture avec les pratiques de l'administration Bush qui, à Guantanamo et ailleurs, a bafoué les valeurs mêmes de nos démocraties. Mais je n'ai pas trouvé "la phrase", l'inspiration profonde qui, en une formule, condenserait dès à présent le sens du nouveau mandat.
Le retour en France faisait sourire à Washington. "Inspirez-vous d'Obama", disaient les uns. "Modernisez la gauche, réveillez-vous", ajoutaient les autres. Il est vrai qu'il y a bien des leçons à tirer de cette élection, et que nous sommes encore loin du compte. Mais il est vrai aussi que le PS commence, enfin, à se remettre au travail. On le voit avec le contre-plan de relance, présenté aujourd'hui par Martine Aubry. Et je l'ai mesuré, aussi, ce soir, au conseil fédéral du PS lot-et-garonnais: débat d'excellente tenue sur la politique économique et sociale, propositions pour que le PS se fasse de nouveau entendre, équipe fédérale au travail autour de Lucette Lousteau pour moderniser la fédération, mobiliser toutes les énergies, et porter sur le terrain nos propositions. Pas de quoi se prendre pour Obama, évidemment. Mais enfin, ces pas vont dans le bon sens.
Vous me permettrez de terminer ce message sur une note plus personnelle, pour dire à mes amis de Washington le plaisir que j'ai eu à les retrouver et à partager avec eux ces moments d'une grande intensité.